Interview de Marie Sebag

Marie Sebag est incontestablement la meilleure joueuse de France avec un palmarès impressionnant : 1998 championne du monde et d’Europe moins de 12 ans, des moins de 14 et des moins de 16 ans, 2004 elle partage la 1ère place du championnat du monde des moins de 18 ans, 2 titres de championne de France, vice-championne d’Europe en 2019 et de nombreuses participations aux championnats du monde féminins. Marie est la première et seule joueuse française à avoir obtenu le titre de Grand-Maître (GMI) en 2008.

G.B.      Quel est le titre dont tu es le plus fier ?

M.S.     Le titre de championne d’Europe cette année. Comme j’avais presque cessé de jouer depuis quelques temps ce titre est très important pour moi.

G.B.      Les échecs et la quête du titre mondial restent-ils toujours une priorité depuis que tu es devenue maman ? Il y a quelques années, tu semblais hésiter à poursuivre ta carrière ?

M.S.     J’aime surtout jouer, gagner, je n’ai jamais rêvé de devenir championne du monde et cela n’a pas été mon objectif. J’aime avant tout le jeu, entraîner de jeunes mais pas forcément enchaîner tournoi sur tournoi.

G.B.      Tu sembles privilégier le côté tactique, le jeu combinatoire, qu’est-ce qui te motive dans le jeu d’échecs ?

M.S.     Je préfère le côté tactique, prendre des risques, me concentrer pleinement sur une partie.

G.B.      Une victoire contre la numéro un du classement mondial, c’est la première fois ?

M.S.     Non j’ai déjà battu Yifan Hou en blitz. Bien sûr, je suis très contente d’avoir remporté cette victoire, je crois que c’était une belle partie !

G.B.      Si la victoire peut rendre très heureux, comment encaisses-tu la défaite ?

M.S.     Cela dépend, ce tournoi est très difficile pour se qualifier et je voulais avant tout faire de bonnes parties. Aujourd’hui, cela ne s’est pas passé comme je l’espérais, je suis un peu déçue. Je me suis dit, ce n’est pas grave, je ferais encore de belles parties ici ou des performances dans d’autres tournois. (Par la suite, Marie a remporté une victoire contre le meilleur Elo du tournoi, Bassem Amin !)

G.B.      Pour jouer à ce niveau travailles-tu beaucoup, avec un coach, es-tu soutenue ?

M.S.     Je pourrais avoir le soutien d’un sponsor mais comme je travaille peu, je me dis qu’il ne sert à rien d’avoir un coach. Je vais essayer de travailler un peu plus, je sais que c’est nécessaire. Pour l’instant j’aime voyager, faire des rencontres, entraîner des jeunes, les échecs m’apportent tout cela et ça me suffit.

G.B.      Que penses-tu de l’évolution du jeu avec des ordinateurs de plus en plus performants ? Es-tu à l’aise avec cette technologie ?

M.S.     J’adore travailler avec l’ordinateur, tester des variantes, apprendre de nouvelles choses. J’aime beaucoup ce travail de recherche avant une partie, de consulter les bases de données, visualiser les parties de mon adversaire.      

G.B.      En règle générale ce genre de travail porte ses fruits ?

M.S.     Parfois je suis surprise dès le premier coup et quelquefois j’anticipe bien et j’arrive dans des positions que je connais et cela m’aide.             

G.B.      Quelle est ta meilleure partie et pourquoi ?

M.S.     Contre le champion du Monde FIDE Rustam Kasimdzhanov, aujourd’hui le secondant de Caruana ! C’était en 2007 aux Pays-Bas et à l’époque je jouais pour mes normes de GMI.

G.B.     Quelle joueuse considères-tu comme la meilleur de l’histoire ?

M.S.     Je n’ai pas de nom à citer si ce n’est que les joueuses deviennent de plus en plus fortes et sont très bien préparées.       

G.B.       Tu es une habituée de ce tournoi, quelle est l’édition dont tu conserves le meilleur souvenir ? As-tu fait une rencontre insolite, découvert une personnalité parmi les artistes ou joueurs ?

M.S.     Je ne m’en souviens plus mais je suis très contente d’être ici à nouveau. C’est un tournoi convivial et contrairement à d’autres, il est possible de côtoyer des musiciens, des artistes, j’aime beaucoup cette ambiance.

G. Bertola